mardi 2 février 2016

Saveur du large

Hier encore, petit enfant confit,
.....je regardais par la fenêtre fermée.
J’avais le goût de partir.
Il me manquait la saveur du large.
Le vent ne pénètre jamais la matière cristalline.

Mes pensées ne savaient pas encore l’adulte
.....et la dureté des hommes.
Désespéré devant mon irréparable naissance,
.....mon ombre noircissait le chemin vivant.
Poète maudit, je m’évadais par la porte
.....entrouverte.
Mais, l’ombre de mon corps fragile
.....prenait quelque retard,
.....me tirait en arrière.

Je tendais mon esprit
.....vers un autre lieu,
.....mais je restais là.
J’avais peur.
Mes préjugés futiles faisaient en sorte
.....que les hommes
.....ne devaient pas compter
.....sur ma venue.

N’étais-je destiné qu’à moi-même ?


Pierre Rousseau, Les fillettes du roi, Guérin Éditeur, 1998.
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